C’est le Rituel qui rassemble les Initiés, bien au-delà des limites du temps et de l’espace profanes, autour du Pavé mosaïque, sous la Voûte étoilée, que Jacques scrutait aussi bien réellement que symboliquement, ou devant la dépouille du Maître d’œuvre, comme c’est notre cas maintenant.
Ce Rituel, notre Vén:. F:. Jacques l’a servi de façon exemplaire, et jusqu’au bout, au gré d’un parcours maçonnique de juste sept ans. Il l’a servi en le faisant vivre de tout son être au cours de chacune des Tenues qu’il a vécues ou dirigées, il l’a servi en le laissant vivre en lui, en se laissant transmuter par lui.
Aujourd’hui, je repense à ce premier mail, au webmaster du site masonic.ch, aux échanges qui ont suivi, aux rencontres chaleureuses, à cette réflexion, poursuivie durant presque trois ans, et amorcée trente ans plus tôt par le contact d’un jeune journaliste avec notre F:. André Chédel.
Jacques nous a fait l’honneur de choisir notre Loge Erasme pour y accomplir un parcours maçonnique à son image : profond, authentique et ouvert. Ouvert sur le monde intérieur comme sur les astres ou les autres, à l’Intemporel comme aux joies de la Vie.
D’emblée, il avait compris l’essentiel, comme en témoigne un texte d’instruction :
« (…) rectifier signifie re-distiller le flegme, c’est à dire remettre dans l’alambic le résidu d’une précédente distillation pour le purifier davantage. Dans ce cas, la matière noble et pure n’est pas celle qui s’évapore et se condense dans le haut de l’alambic, mais celle qui reste dans la cuve (l’athanor) et qui s’améliore à chaque cuisson. C’est exactement ce que j’ai ressenti.
Vitriol, c’est donc un programme longue-durée pour toute une vie maçonnique. »
Ce programme, Jacques l’a suivi, sans jamais se décourager, fidèle à lui-même comme à ses engagements, et au travers des joies comme des difficultés. Il avait en lui la force qu’il identifiait déjà dans son Chef-d’œuvre :
« Cette Force n’existe qu’en moi: elle est dans ma volonté de rechercher la Lumière de la Connaissance. Les trois grandes Lumières de la Franc-Maçonnerie ne peuvent rien pour moi si je n’ai pas décidé de les mettre en œuvre par la Force de ma volonté exercée consciemment sur le Levier de l’Initiation. »
Ses engagements, il les a tenus avec une rigueur qui peut servir d’exemple à tous ceux qui sont ou seront appelé à diriger une Loge. A chaque Tenue, d’ailleurs, il portait sur lui le serment du Vénérable, qu’il avait copié de sa main. Ce serment, non seulement il le connaissait par cœur, mais il en a honoré tous les termes, et je le répète volontiers, de façon exemplaire :
« Je m’engage à n’employer l’autorité que je reçois de mes Frères que pour le bien de l’Ordre Maçonnique en général et de la Respectable Loge Erasme en particulier.
Je promets à cette Juste et Parfaite Loge de la conduire dans le respect de la Tradition, d’observer les Statuts qui lui sont propres et de veiller à son progrès dans l’Art royal. »
Quand il m’a donné ce papier, qui l’accompagnait depuis trois ans, c’est l’un des plus beaux cadeaux qu’il m’ait été donné de recevoir. Mais le plus beau, et de loin, c’était simplement lui, comme Filleul, comme Frère, puis comme Pair.
Car c’est le rêve de tout Initié que de voir un jour l’un de ses suivants dans la grande Chaîne de la transmission initiatique, le rejoindre, puis le dépasser. Comme son Parrain, Jacques m’a fait cet inestimable présent, mais il l’a surtout fait à notre Loge Erasme, qui n’existerait peut-être plus sans lui, et il l’a fait à la Maçonnerie tout entière.
Erasme lui a transmis la Lumière, Jacques l’a faite briller, et il a su, tout au long de son parcours, la vivifier, la faire vivre en lui et la transmettre.
Aujourd’hui, il nous a laissés, mais pas abandonnés. Son exemple continue à nous guider et à nous inspirer dans notre quête de la Sagesse, de la Force et de la Beauté.
Puissions-nous donc marcher comme lui, sur la Voie de la Conscience, le nez dans les étoiles, avec ou sans télescope, l’esprit ouvert et la Lumière du Cœur dans le regard.
Le Vén:. M:. de la R:. L:. Erasme
Novembre 2006 (è.v.)